Le travail du jeune cheval

23 février 2024 Temps de lecture: 7 minutes

1- Définitions

Le travail du jeune cheval de 4 et 5 ans consiste à poser toutes les bases de dressage du cheval, et à l’éduquer afin de pouvoir le mettre dans de bonnes dispositions à la fois physiques et mentales pour pouvoir se développer au mieux. Un jeune cheval, comme un enfant, a besoin d’être encadré et accompagné afin d’apprendre à travailler, avec pour objectif que son travail soit pris comme un jeu et non comme une contrainte. C’est à ce moment là du développement d’un jeune cheval qu’il est essentiel de savoir où est la limite dans le respect du cavalier, sans être trop contraignant pour ne pas marquer un cheval en plein apprentissage, ce qui pourrait avoir des conséquences sur son développement, notamment mental. Au début du travail sur le plat pour un jeune cheval, il faut que son cavalier soit très clair dans l’emploi des aides, afin que le cheval comprenne les ‘commandes’ de base, comme le mouvement en avant et la prise de contact avec le mors. Un cheval allant sur ses 5 ans, même s’il travaille moins qu’un cheval plus vieux, doit avoir une bonne compréhension du mouvement en avant, des trois allures et des transitions, ainsi que, selon le cheval, un travail plus ou moins poussé dans le travail sur deux pistes. La progression d’un jeune cheval n’est pas automatique et systématiquement la même, chaque cheval est différent et leur physique joue aussi un rôle. Leur croissance n'étant pas terminé, il faut savoir doser le travail pour ne pas casser le corps et le mental du jeune cheval.

2- Le fonctionnement chez le jeune cheval

Le fonctionnement du jeune cheval de 4 et 5 ans et identique à celui d’un cheval plus âgé. Le travail de base de dressage d’un cheval reste le même tout au long du travail du cheval, avec comme différence le degré d’intensité et d’exigence qui grandit avec l'expérience du cheval. Les jeunes chevaux ne sont pas musclés correctement donc il est forcément plus dur dans le début du travail de les garder de manière régulière dans une bonne attitude de travail. Néanmoins, avec une exigence grandissante au fil du temps, le jeune cheval va tendre au travail du plus vieux, tout en construisant son corps. Un cheval au travail doit en premier lieu utiliser son dos, c’est-à-dire que le dos ne doit pas être figé quand le cheval est en mouvement. Si le cheval est au trot, et que le dos derrière la selle est complètement fixe, cela signifie que le cheval n’utilise pas ses postérieurs et donc ne travaille pas avec tout son corps. Dans ce cas, l’attitude sera fausse, car seulement la partie devant le garrot donnera ou non, une impression de pli/ acceptation de la mâchoire. Le ‘cercle’ du fonctionnement d’un cheval commence donc dans les postérieurs, pour remonter ensuite dans l’arrière du dos entre la selle et la croupe, et continuer sur tout le dos jusqu’au garrot. L’encolure vient ensuite jusqu’en haut de la nuque, et en conséquence l’acceptation de la mâchoire. Cette acceptation est d’ailleurs essentielle quand on évoque l’attitude d’un cheval. Pour pouvoir modifier l’attitude, il est nécessaire d’avoir un cheval qui accepte le contact, ce qui veut surtout dire qu’il y a une souplesse dans la mâchoire. Cette souplesse vient d’abord d’un bon fonctionnement de la partie arrière du cheval. Ce cercle de fonctionnement commence donc en réalité encore plus tôt, avec la jambe du cavalier qui va inciter au fonctionnement de l’arrière-main. Un fonctionnement juste va donc amener à la contraction de l’abdomen, et le cheval va donc ‘s'asseoir’ davantage sur son arrière- main pour avoir le garrot plus haut que la croupe, et finalement la nuque comme plus au point. Cependant, un cheval a naturellement plus de poids sur l’avant main que sur l’arrière main. C’est donc le travail du cavalier de progressivement venir l'asseoir pour qu’il mette son poids derrière. Pour évoquer l’attitude avec plus d’attention, quand le cheval travaille dans un fonctionnement juste, et que donc tout son corps travaille, il est plus simple de varier l’attitude, d’avoir un cheval plus long et bas devant pour travailler l’extension, ou encore d’avoir un cheval dans une attitude dite de ‘présentation’ où le cheval est avec la nuque comme point le plus haut. Cette attitude commence à apparaître chez les chevaux de 5 ans, mais il n’est pas nécessaire de remonter un 4 ans dans une vraie attitude de présentation de façon régulière. Toutefois, il faut faire attention à ce que le cheval ne soit pas trop fermé devant, qu’il ai la tête devant la vertical, sinon son nez est derrière la ligne verticale partant du haut de la nuque. Dans ce cas, le fonctionnement n’est pas naturel car le cheval est en hyperflexion, et donc ne peut pas se développer musculairement de façon correcte. L’attitude du cheval doit donc pouvoir varier à tout moment (plus ou moins haute), mais dans tous les cas, le cheval doit être devant la verticale tout en restant souple dans la bouche, il ne peut pas s’appuyer sur le mort, il doit l’accepter car il y a une souplesse dans sa mâchoire. La souplesse dans la mâchoire est nécessaire à une attitude juste, et celle-ci vient du fonctionnement de l’arrière main du cheval ce qui montre donc bien que ces deux points sont étroitement liés. Par ailleurs, le fonctionnement du cheval ne peut pas être correct si le cheval n’est pas en avant. Ce dernier doit être devant les jambes et non derrière, c’est à dire qu’il doit être actif et réactif aux demandes de son cavalier. Une action du bas de la jambe du cavalier doit avoir une réaction immédiate de la part du cheval, et un cheval qui est dans un bon fonctionnement ne devrait pas être lourdement poussé à chaque foulée.

3- Fautes et erreurs

Un jeune cheval commence réellement à travailler après son débourrage vers 4 ans traditionnellement. Il faut donc garder en tête à chaque instant du travail d’un jeune que son expérience est très limitée, et qu’il faut présenter les exercices de manière claire et précise. Un cavalier avec des aides confuses va inquiéter un jeune cheval qui a souvent besoin d’être rassuré. Il faut aussi savoir prendre le temps qu’il faut avec les jeunes chevaux. Un cheval qui donne beaucoup à son cavalier va induire ce dernier à vouloir en demander plus, et parfois trop, ce qui peut avoir des répercussions dans la suite de la carrière du cheval. Un jeune cheval ne doit pas travailler tous les jours, et sa charge de travail doit augmenter de manière progressive. Il est impossible de commencer le travail d’un cheval et de vouloir en peu de temps obtenir un travail juste dans la durée. Si un cheval prend plus de temps à se développer qu’un autre, ce n’est pas forcément qu’il ne sera pas ‘bon’, mais peut être qu’il a besoin de plus de temps pour prendre en maturité, pour se développer physiquement sans se faire mal et se faire peur. Parce qu’un jeune cheval est souvent énergique et sur ses gardes, il faut aussi savoir les habituer à ce qu'ils passent beaucoup de temps en dehors d’une carrière, en faisant des trottings et en variant le travail pour ne pas rentrer dans une routine lassante.

D’un point de vu esthétique, il est facile de se dire que si le cheval est ‘rond’ devant la selle, le fonctionnement est juste, ce qui est rarement vrai; dans ce cas, le cheval ne travaille pas avec tout son corps. Au pas, il ne sera pas dans ses traces, ce qui signifie que le pas n’est pas correct (il sera court derrière, et il y a un risque de latéralisation). Au trot, le cheval ne prendra pas d’amplitude devant, même s’il est naturellement assez haut dans ses antérieurs ce qui donne une impression de cheval aérien. Le cheval au trot doit pousser avec ses postérieurs vers l’avant, pour que le mouvement du postérieur soit aussi marqué que celui de l’antérieur. Au galop, il est important que le cheval pousse non seulement vers le haut, mais surtout vers l’avant, et que ses postérieurs dans le mouvement ne passent pas derrière la ligne verticale des hanches. Une erreur récurrente est donc de voir des chevaux qui fonctionnent seulement devant le cavalier et non derrière, qui sont donc montés avec les mains et non avec les jambes et l’assiette. Par ailleurs, mettre du pli à un cheval donne une impression d’acceptation du mors mais le cheval n’est alors pas droit et tendu sur les deux rennes, et ne forme donc pas une ligne droite de la croupe à la nuque, ce qui est important pour que le cheval soit droit tout du long et donc qu’il n’y ait pas de faiblesse qui se créé à une main, et donc de déséquilibre entre la gauche et la droite. Il est plus simple pour un cavalier de monter avec ses mains et de ne pas utiliser, comme le cheval, tout son corps car cela demande pour l’un comme pour l’autre un effort plus complet. Ce n’est donc pas parce que le cheval est plié qu’il y a une acceptation de la mâchoire, et que le cheval est ‘rond’ même s’il en a l’air. Une autre erreur commune est un mauvais mouvement en avant. Trop pousser un cheval en avant peut amener à de la précipitation et donc le cheval court sur l’avant-main, sans utiliser ses abdominaux. A l’inverse, il ne faut pas se retrouver avec un cheval derrière la jambe, qui ne pousse alors pas du tout avec l’arrière-main, et qui, même si dans l’idée le fonctionnement n’est pas faux, ne va pas se muscler car il n’y a aucun effort physique. Le cheval peut aussi ‘se coller à la jambe’, c’est-à-dire qu’il s’appuie contre la jambe afin de se rendre insensible aux actions du cavalier. Ceci peut alors donner aux cavaliers une impression d’effort mais cela correspond plus à un effort dans le vide. Il faut dans ce cas que le cavalier ‘décolle’ le cheval de sa jambe en étant par exemple plus clair sur une demande plus courte et intense, pour avoir une réaction plus marquée du cheval. Au fil du temps, le cheval devient alors plus réactif à l’action du cavalier et le cavalier peut alors se focaliser plus sur l’attitude.

4- Mon expérience personnelle

Tous les jeunes chevaux et poneys que j’ai eu au travail m’ont appris des choses différentes. Ils étaient tous très différents, certains avec beaucoup de sang, d’autres beaucoup plus calmes. Cela permet de se rendre compte que le mental d’un jeune cheval joue beaucoup sur son travail, car les plus talentueux ne sont pas forcément ce qui vont le plus loin, s’ils sont compliqués à gérer dans le mental.

Pour certains chevaux, il faut prendre beaucoup plus de temps que d’autres car ils sont plus fragiles dans le physique, et il faut donc faire attention à ne pas les brûler. Certains chevaux, à l’inverse, restent très froid dans leur tête et il est possible avec eux d’être beaucoup plus sur un travail comme un cheval d’âge dans la manière de les aborder, même si le travail reste moins intense.

Si les bases du travail d’un cheval ne sont pas bonnes, il faut savoir redescendre dans le ‘niveau’ que le cheval paraît avoir, et redonner de l’importance aux bases du travail d’un jeune cheval, c’est-à-dire le mouvement en avant, l’acceptation des aides, et un contact de plus en plus constant et régulier. Jusqu’à ce que ces bases soient acquises pour le cheval, il est inutile de vouloir effectuer des mouvements compliqués, même si certains aident parfois pour améliorer le mouvement en avant. Il est aussi important d’établir des règles strictes pour que le jeune cheval sache sur quoi s’appuyer sans le laisser prendre de mauvaises habitudes; et si ces habitudes sont déjà prises, il faut savoir progressivement les bannir dans le travail.

Un jeune cheval qui a du mal à se concentrer et à se tendre nécessite de la patience, car un cavalier qui s’énerve dans ce cas là va seulement embrouiller le cheval et sa compréhension des aides du cavalier.

Photo de Marie Diebold avec un cheval.
Marie Diebold

Co-fondatrice et Présidente
Ingénieure informatique & Enseignante DEJEPS